Jacques Parizeau, économiste et auteur
On sait que l'industrie manufacturière québécoise va très mal. Depuis 2003, elle a perdu environ 100 000 emplois. Cela s'accompagne d'une grave crise de l'industrie forestière. Pourtant, l'emploi total augmente au Québec, et le taux de chômage est moins de 7 %.
L'industrie manufacturière a été frappée de plein fouet, comme celle de l'Ontario d'ailleurs, par la hausse de 50 % en quatre ans de la valeur du dollar canadien par rapport au dollar américain. Le prix de nos exportations a augmenté, et celui de nos importations a diminué. Nous vendons moins à l'étranger, nous achetons plus, les emplois dans l'industrie tombent. La situation est d'autant plus sérieuse que la productivité d'une part importante de l'industrie québécoise est inférieure à celle de l'Ontario, qui est inférieure à celle des États-Unis. Un dollar canadien à 0,65 $ palliait ces différences de productivité. Il servait même de chloroforme. Pourquoi faire des efforts pour accroître la productivité et mettre au point de nouveaux produits, puisqu'on vend facilement aux États-Unis? Mais à parité avec le dollar américain, l'évolution de certains secteurs industriels ressemble à une débandade, surtout s'ils sont exposés à la concurrence des produits chinois. En quatre ans, la Chine est devenue le deuxième fournisseur international du Québec. Tous les secteurs ne sont évidemment pas touchés; l'équipement de transport, les produits électriques et jusqu'à récemment l'électronique se défendent fort bien.
La hausse du dollar canadien a réduit substantiellement le prix de la machinerie et de l'équipement. Pourtant, les investissements de ce type avaient peu augmenté jusqu'à récemment. On ne peut donc s'étonner qu'il n'y ait pas de rattrapage généralisé de productivité.